Wystan Hugh Auden1, plus connu sous la signature W. H. Auden (York, 21 février 1907 – Vienne, Autriche, 29 septembre 1973) est un poète, essayiste, dramaturge, librettiste2 et critique d'origine britannique, considéré comme l’un des plus importants et influents poètes du XXe siècle. Il a vécu la première partie de sa vie au Royaume-Uni, puis a émigré aux États-Unis en 1939 et est devenu citoyen américain en 1946. Il est élu Chancelier de l'Academy of American Poets en 1954, il occupera cette charge jusqu'en 1973.
Auden passe le début de son enfance à Harborne, Birmingham, où son père le Dr George Auden est professeur de santé publique à l’université de Birmingham. Dès l’âge de huit ans, il est envoyé en pension, d’abord dans le Surrey, puis à la Gresham's School de Norfolk.
Il étudie ensuite au collège de Christ Church (Oxford), puis va vivre pendant un an à Berlin à l’époque de la République de Weimar, dont l’atmosphère de tolérance est plus favorable à l’expression ouverte de son homosexualité. De retour au Royaume-Uni, il enseigne dans deux écoles de garçons de 1930 à 1935. La plus importante, et où il est le plus heureux, est la Downs School de Colwall, près de Great Malvern, où il passe trois ans et écrit quelques-uns des plus beaux poèmes d’amour du début de son œuvre, tels This lunar beauty, Lay your sleeping head, my love, Fish in the unruffled lakes et Out on the lawn I lie in bed.
En 1935, Auden fait un mariage de convenance avec Erika Mann, la fille lesbienne de l'écrivain allemand Thomas Mann, afin de procurer à celle-ci un passeport britannique lui permettant d’échapper au Troisième Reich. Bien que le « couple » n’ait jamais vécu ensemble, ils demeurèrent amis et ne prirent jamais la peine de divorcer4.
En 1937, il se rend en Espagne pour conduire une ambulance et aider, de cette manière, la République espagnole pendant la Guerre d'Espagne. Il se met à travailler au bureau de presse et de propagande, une tâche qu'il abandonne, fatigué par les intrigues, pour visiter le front. Ce séjour en Espagne de sept semaines l'affecte profondément et sa vision de la société devient d'autant plus complexe qu'il y découvre des réalités politiques plus ambiguës et plus troublantes qu'il ne l'avait imaginé5.
Auden et son amant Christopher Isherwood émigrent aux États-Unis en 1939. Ce départ du Royaume-Uni, juste au moment où débute la Seconde Guerre mondiale, est considéré par certains comme une trahison et la réputation poétique d’Auden en souffre brièvement. Peu après son arrivée à New York, il donne une lecture publique avec Isherwood et Louis MacNeice, où il rencontre pour la première fois le poète Chester Kallman, qui devient son amant et compagnon pour le reste de sa vie, bien que cette relation fût souvent orageuse.
Ayant passé les années de guerre aux États-Unis, Auden est naturalisé américain en 1946. Il retourne cependant en Europe en été à partir de 1948, d’abord en Italie, puis en Autriche. De 1956 à 1961, il est professeur de poésie à l'université d’Oxford, un poste qui exige seulement de sa part de donner trois conférences par an, de sorte qu’il ne passe que quelques semaines à Oxford durant cette période. Pendant sa dernière année de vie, en 1973, il revient de New York à Oxford.
Œuvres
Auden a écrit une quantité notable d’ouvrages de critique et d’essais ainsi que des pièces de théâtre en collaboration avec son compagnon Christopher Isherwood, mais il est surtout connu en tant que poète. Son travail se caractérise par une variété exceptionnelle allant de formes traditionnelles rigoureuses telles que la villanelle à des formes originales et complexes avec l’habileté technique qu’il déploie quelle que soit la forme employée. Il a été aussi responsable en partie du retour au mètre anglo–saxon accentué dans la poésie anglaise.
Il existe une controverse sur le fait qu’Auden a retravaillé ses poèmes dans leurs publications successives et a fait supprimer plusieurs de ses poèmes les plus connus des éditions ultérieures parce qu’il ne les trouvait plus ni sincères ni exacts. Son exécuteur testamentaire littéraire, Edward Mendelson, affirme dans son introduction aux Poèmes choisis d’Auden que c’est là en fait une preuve de sa foi en le pouvoir et l’importance de la poésie. Ce recueil comprend certains vers qu'Auden avait rejetés et des versions initiales de ceux qu’il avait ensuite modifiés.
Avant de devenir anglican (dans une version de l’anglicanisme plus proche du protestantisme que le catholicisme de ses parents), Auden s’était activement intéressé aux débats politiques de la gauche de son temps et certaines de ses œuvres reflètent ces préoccupations, comme Spain, un poème sur la guerre civile espagnole, et September 1, 1939 sur le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale (deux poèmes répudiés ultérieurement par lui et exclus de ses Selected Poems). Parmi ses autres œuvres6, on note également son oratorio de Noël, For the Time Being, The Unknown Citizen, Musée des Beaux-Arts, et des vers sur la mort de William Butler Yeats et de Sigmund Freud.
Auden est souvent considéré comme appartenant à un groupe d’écrivains d’inspiration commune, parmi lesquels on trouve Edward Upward, Christopher Isherwood, Louis MacNeice (avec qui il a collaboré aux Letters from Iceland en 1936), Cecil Day-Lewis et Stephen Spender, bien que lui–même ait cessé de se considérer comme membre de ce groupe dès l’âge de 24 ans.
Il a aussi collaboré étroitement avec des compositeurs, écrivant un livret d’opéra pour Benjamin Britten (Paul Bunyan), et, en collaboration avec Chester Kallman, un livret pour Igor Stravinski (The Rake's Progress), un autre pour Nicolas Nabokov (Love's Labour's Lost) et deux autres pour Hans Werner Henze (Elegy for young Lovers et Les Bassarides).
Publications
Œuvres complètes
Edward Mendelson édite les œuvres complètes de W. H. Auden aux éditions Princeton University Press :
Volume 1 : Prose and Travel Books in Prose and Verse,1926-1938, éd. 1997,
Volume 2 : Prose : 1939-1948, éd. 2002,
Volume 3 : Prose: 1949-1955, éd. 2008,
Volume 4 : Prose: 1956-1962, éd. 2010,
Volume 5 : Prose: 1963–1968, éd. 2015,
Volume 6 : Prose: 1969–1973, éd. 2015,
volume 7 : Libretti and Other Dramatic Writings, 1939-1973, éd. 1993,
Recueils de poésie
W.H. Auden: Poems Selected by John Fuller, éd. Faber and Faber, 1998, rééd. 2009
Tell Me the Truth about Love, éd. Faber and Faber, 1999,
Auden: Poems, éd. Everyman's Library, 1995,
As I Walked Out One Evening: Songs, Ballads, Lullabies, Limericks & Other Light Verse, éd. Vintage, 1995,
Collected Poems, éd. Vintage, 1991,
The English Auden: Poems, Essays and Dramatic Writings, 1927-1939, édité par Edward Mendelson, éd. Faber & Faber, 1978, rééd. 1988,
Thank You, Fog: Last Poems, éd. Random House, 1974,
Epistle to a Godson, éd. Faber and Faber, 1972,
Academic Graffiti (Faber and Faber, 1971)
City Without Walls and Other Poems (Random House, 1969)
Collected Longer Poems (Random House, 1968)
Collected Shorter Poems 1927-1957 (Faber and Faber, 1966)
About the House (Random House, 1965)
Homage to Clio (Faber and Faber, 1960)
Selected Poems, éd. Vintage, 1958, rééd de 1979,
The Old Man’s Road (Voyages Press,1956)
The Shield of Achilles (Random House, 1955)
Nones (Random House, 1951)
Collected Shorter Poems 1930-1944, éd. Faber and Faber, 1950, rééd. 1969,
The Age of Anxiety: A Baroque Eclogue, éd. Random House, 1947, rééd. Princeton University Press, 2011,
The Collected Poetry of W. H. Auden (Random House, 1945)
For the Time Being, a Christmas Oratorio, éd. Random House, 1944, rééd. Princeton University Press, 2013,
The Sea and the Mirror (1944)
The Double Man (Random House, 1941)
The Quest (1941)
Another Time, éd. Random House,1940, rééd. Faber and Faber, 2007,
Selected Poems (Faber and Faber, 1938)
Spain (Faber and Faber, 1937)
Look, Stranger! (Faber and Faber, 1936)
The Orators (Faber and Faber, 1932)
Poems (1930)
Poems (privately printed, 1928)
Essais
The Sea and the Mirror, éd. Princeton University Press, 2001, rééd. 2005,
Lectures on Shakespeare, texte établi par Arthur Kirsch, éd. Princeton University Press, 2002,
Forewords and Afterwords (Random House, 1973)
Selected Essays (Faber and Faber, 1964)
The Dyer’s Hand and Other Essays, éd. Random House, 1962, rééd. Vintage. 1990
The Enchaféd Flood (Random House, 1950)
Journey to a War, coécrit avec Christopher Isherwood, éd. Faber and Faber, 1939, rééd. 2002,
Letters from Iceland coécrit avec Louis MacNeice, éd. Random House, 1937, rééd. Faber and Faber, 2002.
Théâtre
On the Frontier (1938)
The Ascent of F.6 (Faber and Faber, 1936)
The Dog Beneath the Skin: or, Where is Francis? (Faber and Faber, 1935)
The Dance of Death (Faber and Faber, 1933)
Paid On Both Sides (1928)
Anthologies
The Portable Romantic Poets: Blake to Poe, coédité avec Norman Holmes Pearson, éd. Penguin Classics, 1950, rééd. 1977,
The Portable Greek Reader, Penguin Books, 1948, rééd. 1977.
Viking Book of Aphorisms, coédité avec Louis Kronenberger, éd. Random House, 1920, rééd. Dorset Press, 1981.
Ouvrages disponibles en langue française
Poésies choisies, traduction Jean Lambert, Paris, Gallimard, coll. "Du monde entier", 1976; Paris, Gallimard, coll. " Poésie", 2005, avec une préface de Guy Goffette.
Dis-moi la vérité sur l'amour, Paris, Christian Bourgois, 1995.
Essais critiques, traduction Claude Habib, Claude Mouchard et Pierre Pachet, suivi de Hannah Arendt, "En souvenir de W.H. Auden", traduction Martine Reyss et Eric Adda, Paris, Belin, 2000.
Shorts, traduction Frank Lemonde, Paris, Rivages poche/Petite Bibliothèque, 2003.
Le Prolifique et le Dévoreur, traduction Béatrice Vierne, Paris, Anatolia/Le Rocher, 2003.
En lisant Shakespeare, conférences reconstituées par Arthur Kirsch, traduction Dominique Goy-Blanquet, Paris, Anatolia/Le Rocher, 2003.
Quand j'écris je t'aime, traduction Béatrice Vierne, Paris, Anatolia/Le Rocher, 2003.
Journal de guerre en Chine avec Christopher Isherwood, traduction Béatrice Vierne, Paris, Anatolia/Le Rocher, 2003.
Lettres d'Islande, avec Louis Mc Neice, Paris, Anatolia/Le Rocher, 2006.
Horae canonicae, Paris, Rivages, 2006.
La Mer et le Miroir : commentaire de La Tempête de Shakespeare, édition bilingue, traduit et présenté par Bruno Bayen et Pierre Pachet, Paris, Le Bruit du Temps, 2009.
Prix et distinction
1967 : récipiendaire de la National Medal for Literature délivrée par le National Book Committee,
1956 : National Book Award en poésie.
1953 : Lauréat du Bolligen Prize7
1948 : Lauréat du Prix Pulitzer de la poésie8,
Articles
Larchfield by Polly Clark review – loneliness, longing and WH Auden, article de Ian Samson pour The Guardian, 20179,
Detective work shows Auden was the model, article de Sean Day-Lewis pour The Guardian, 201710,
W.H. Auden and the Poetics of Transport, article d'Aurélien Saby pour la revue Études Anglaises, volume 69, 201611,
W. H. Auden, de l’Atlantide à la Nouvelle Jérusalem, article de Pascal Aquien pour la revue Études Anglaises, tome 54, 200112,
Histoire d’une traduction : Funeral Blues de W. H. Auden, article de Bérangère Abdoul et aliud pour la revue La Linguistique, volume 37, 200113,
W. H. Auden honored, article de Leslie Bennetts pour le New York Times, 198314,
W. H. Auden Dies in Vienna, article d'Israël Shenker pour le New York Times, 197315,
Essais en langue anglaise
Humphrey Carpenter, W. H. Auden: A Biography, éd. Faber and Faber, 2014
Stephen J. Schuler, The Augustinian Theology of W. H. Auden, éd. University of South Carolina Press, 2013
Richard Davenport-Hines, Auden (1995)
Edward Mendelson, Early Auden (1981)
Edward Mendelson, Later Auden (1999)
Norman Page, Auden and Isherwood: The Berlin Years (2000)
Thekla Clark, Wystan and Chester: A Personal Memoir of W. H. Auden and Chester Kallman (1996)
Dorothy J. Farnan, Auden in Love (1985)
Essais en langue française
Guy Goffette, Auden ou l'œil de la baleine, Paris, Gallimard, coll. "L'un et l'autre", 2005.
et,
Christopher Isherwood est un écrivain britannique, naturalisé américain en 1946, né le 26 août 1904 à Disley (comté de Cheshire) et mort le 4 janvier 1986 à Santa Monica (Californie).
Berlin
Plaque commémorative au no 17 de la Nollendorfstraße dans le quartier de Schöneberg, rappelant le séjour d'Isherwood dans cette maison de Berlin.
Rejetant l'élite conservatrice britannique qui ne comprendrait pas son attirance pour les hommes, en 1929 il se réfugie à Berlin, capitale culturelle de l'entre-deux-guerres et de la République de Weimar, où il compte passer quelques semaines avec Auden1. Il y restera jusqu'en 1933, année où le parti nazi prend le pouvoir et le chasse d'Allemagne.
Deux ans auparavant, en 1931, il avait rencontré Jean Ross, une actrice et chanteuse britannique qui servira de modèle au personnage de Sally Bowles, comme Gerald Hamilton l'inspirera pour celui de M. Arthur Norris; enfin, en septembre, le poète William Plomer lui présente Edward Morgan Forster qui devient rapidement son mentor (à sa mort, en 1970, ce dernier lui léguera les droits d'auteur de Maurice). En 1932, il rencontre Gerald Heard et, la même année, publie Le Mémorial (The Memorial), qui exprime par le biais de la fiction les conflits qui l'opposent à sa mère.
Pendant quatre ans, il enseigne l'anglais et cède sans retenue à sa passion pour les beaux jeunes gens dans une société allemande alors très permissive. C'est ainsi qu'il fera la connaissance de Heinz Neddermeyer, son premier grand amour2. Il évoque la vie sexuelle underground berlinoise dans des écrits qui inspireront John Henry Mackay pour The Hustler (Le Prostitué)3. Ces années sont décrites dans Adieu à Berlin (Berlin Stories), recueil de nouvelles paru en 1945 où l'on trouve incluant Mr. Norris change de train (Mr. Norris Changes Trains, 1935), Sally Bowles (1937) et Adieu à Berlin (Goodbye to Berlin, 1939). L'œuvre est adaptée au théâtre sous le titre I Am a Camera (en) par John Van Druten; la première a lieu le 8 novembre 1951 à Hartford (Connecticut) et sera reprise le même mois à Broadway. En 1955, une première version cinématographique est réalisée par Henry Cornelius sous le titre Une fille comme ça (I Am a Camera); en 1966, à New York, John Kander et Fred Ebb en font une comédie musicale, Cabaret, qui sera adaptée au cinéma en 1972, par Bob Fosse sous ce titre. C'est Cabaret, dans lequel Sally Bowles est incarnée par Liza Minnelli. Cette dernière se verra remettre pour ce rôle l'Oscar de la meilleure actrice.
Une plaque commémorative, sur la maison où vécut Isherwood, au no 17 Nollendorfstraße, dans le quartier de Schöneberg, rappelle son séjour à Berlin.
Avant-guerre
Durant les années précédant la Seconde Guerre mondiale, Isherwood voyage à travers l'Europe ; il séjourne notamment à Copenhague et à Sintra. Il collabore aussi à l'écriture de trois pièces de théâtre avec Auden : Le Chien sous la peau (1935), L'Ascension de F6 (1937) et Sur la frontière (1938). C'est pendant cette période qu'il écrit Le Lion et son ombre (1938), titre emprunté à une nouvelle qu'il comptait écrire et qui devient le récit semi-autobiographique de son enfance et de sa jeunesse.
En 1938, Auden et Isherwood voyagent en Chine, alors ravagée par la guerre civile et l'invasion japonaise, ce qui fournira la matière du Journal de guerre en Chine (1939).
Vie américaine
Après un premier voyage aux États-Unis en juillet 1938, il quitte à nouveau Londres avec Auden, le 19 janvier 1939, et débarque aux États-Unis le 26 janvier. Le couple passe quelques mois à New York, mais au printemps, Isherwood s'installe en Californie où il gagne sa vie en écrivant des scénarios pour Hollywood et en donnant des cours tandis qu'Auden reste sur la côte Est. L'exil américain de l'écrivain est diversement apprécié par la presse britannique en ces temps où la Grande-Bretagne s'apprête à déclarer la guerre à l'Allemagne.
À Hollywood, en 1939, Isherwood poursuit ses rencontres spirituelles avec l'historien Gerald Heard, fondateur du monastère de Trabuco Canyon, qu'il avait offert à la Vedanta Society de Californie du Sud. Il adhère à la philosophie hindouiste Védanta, comme Aldous Huxley, Bertrand Russell, Christopher Wood, John Yale et Jiddu Krishnamurti, entre autres. Grâce à Huxley, il se lie d'amitié avec le compositeur russe Igor Stravinsky.
En juillet 1940, il hérite de Wyberslegh Hall, que ses ancêtres, des fermiers prospères, avaient acheté au XVIe siècle, et fait don de ce manoir élisabéthain enouré d'un vaste domaine, à son frère Richard. La même année, il embrasse la religion hindouiste suite à la rencontre adevec Swami Prabhavananda. Mon gourou et son disciple (My Guru and His Disciple) narre cette relation décisive dans la vie de l'écrivain britannique; au fil du temps, il effectue de nombreuses traductions de textes relatifs à cette philosophie, qui va influencer son œuvre littéraire.
À la veille de la Seconde Guerre mondiale, il affiche ses positions pacifistes et, pendant le conflit, de 1941 à 1942, il se rend à Haverford en Pennsylvanie, dans un foyer quaker où il travaille avec des réfugiés allemands en tant qu'objecteur de conscience. En 1943, il passe 6 mois dans un Centre Vedanta. Il rencontre par hasard, dans une librairie de Los Angeles, Ray Bradbury, auteur notamment des Chroniques martiennes, dont il fera une critique élogieuse. Cela stimulera la carrière de cet écrivain de science-fiction et marquera le début de leur amitié.
Le 8 novembre 1946 il obtient la citoyenneté américaine, ce qui l'oblige à faire son service militaire; toutefois, faisant valoir le volontariat accompli entre 1941 et 1942 auprès de réfugiés européens dans son foyer quaker, il obtient le statut d'objecteur de conscience. Il vit aors avec le photographe William (Bill) Caskey, avec qui il voyage en l'Amérique du Sud en 1947. Il en tireront Le Condor (1949), dont le texte est d'Isherwood et les photographies de Caskey.
Donald Bachardy
En 1953, le jour de la Saint-Valentin, (le 14 février), à 48 ans, il rencontre Don Bachardy chez des amis sur la plage de Santa Monica. Surmontant plusieurs crises, Isherwood ne quittera plus ce portraitiste américain4 âgé de 18 ans. La différence d'âge fait jaser, mais ils parviennent tout de même à s'intégrer dans la société californienne et se font de nombreux amis. Au début de leur vie commune, Isherwood écrit Le Monde au crépuscule, méditation d'un jeune écrivain sur ses échecs amoureux et ses désirs homosexuels. Bachardy dactylographie le manuscrit. Leur vie commune est illustrée par le film Chris & Don: A Love Story (2007)5.
De 1959 à 1962, Isherwood est sollicité pour animer des ateliers d'écriture au Los Angeles State College (devenue Université d'État de Californie à Los Angeles) puis, de 1965 à 1966, sur le campus de l'Université de Californie à Santa Barbara, à Riverside et Los Angeles.
Quand sa mère meurt, le 15 juin 1960, à l'âge de 91 ans, il refuse d'assister à son enterrement. Il reste vivre en Californie, où il situe Un homme au singulier (1964), sans doute son roman le plus connu. Il raconte une journée dans la vie de George, homosexuel d'âge mûr qui se retrouve seul après la mort de son compagnon, Jim. Ce récit sera adapté au cinéma par Tom Ford en 2009 sous le titre A Single Man. Toujours en 1964, il est le scénariste du film de Tony Richardson Le Cher disparu, d'après le roman d'Evelyn Waugh, une satire d'une ironie grinçante sur le business des entreprises privées de pompes funèbres aux États-Unis.
En 1973 disparaissent W. H. Auden et Jean Ross.
Il est nommé au Nebula Award en 1975 pour le scénario de Frankenstein: The True Story, téléfilm réalisé par Jack Smight, et reçoit la médaille Brandeis pour l'ensemble de son œuvre. En 1976 paraît Christopher and His Kind; Heinz, qui entre-temps s'est marié et est devenu père d'un petit garçon baptisé Christophe en hommage à leur amitié, en est très choqué ; ils ne se reverront plus. Swami Prabhavananda disparaît à la même époque, puis c'est le tour de son frère Richard, en 1979.
En 1981 il déclare un cancer de la prostate qui l'emportera le 4 janvier 1986, chez lui, à Santa Monica. Bachardy, devenu un dessinateur renommé, exécute pour la postérité les derniers portraits de son compagnon.
Œuvres
Romans
All the Conspirators (1928)
Publié en français sous le titre Tous les conspirateurs, traduit par Léo Dilé, Julliard, 1968 ; réédition, Paris, UGE, coll. « 10/18. Domaine étranger » no 1452, 1981 (ISBN 2-264-00390-1) ; réédition, Paris, Fayard, 2012 (ISBN 978-2-213-66670-9) ; réédition, Paris, Grasset, coll. « Les cahiers rouges », 2015 (ISBN 978-2-246-85083-0)
The Memorial (1932)
Publié en français sous le titre À quatre temps, traduit par Henri de Briel et Guillot de Saix, Paris, éditions Nagel, coll. « Les grands romans étrangers », 1945 ; réédition sous le titre Le Mémorial, dans une nouvelle traduction par Michel Doury, Paris, C. Bourgois, 1988 (ISBN 2-267-00534-4) ; réédition, Paris, C. Bourgois, coll. « 10/18. Domaine étranger » no 2139, 1990 (ISBN 2-264-01362-1) ; réédition, Paris, C. Bourgois, 2001 (ISBN 2-267-01593-5)
The Last of Mr. Norris (1935), paru en 1945 sous le titre Mr. Norris changes Trains dans le recueil de nouvelles Berlin Stories
Publié en français sous le titre Mr. Norris change de train, traduit par Léo Dilé, Julliard, coll. « Cahier des saisons », 1964 ; réédition, Paris, UGE, coll. « 10/18. Domaine étranger » no 1419, 1981 (ISBN 2-264-00351-0) ; réédition, Paris, Fayard, 2012 (ISBN 978-2-213-66668-6) ; réédition, Paris, Grasset, coll. « Les cahiers rouges », 2014 (ISBN 978-2-246-81139-
Lions and Shadows: An Education in the '20 (1938), roman semi-autobiographique
Publié en français sous le titre Le Lion et son ombre, traduit par Maurice-Ian Hilleret, Paris, le Sagittaire, 1947 ; réédition, Paris, le Sycomore, 1984 (ISBN 2-86262-226-5) ; réédition, Paris, Minerve, coll. « Domaine étranger », 1988 (ISBN 2-86931-018-
; réédition sous le titre Le Lion et son ombre : une éducation dans les années 1920, dans une nouvelle traduction par Pierre-Emmanuel Dauzat, Paris, Fayard, 2012 (ISBN 978-2-213-66664-
; réédition, Paris, Grasset, coll. « Les cahiers rouges », 2016 (ISBN 978-2-246-85082-3)
Prater Violet (1945)
Publié en français sous le titre La Violette du Prater, traduit par Léo Dilé, Julliard, coll. « Cahier des saisons », 1967 ; réédition, Paris, UGE, coll. « 10/18. Domaine étranger » no 1436, 1981 (ISBN 2-264-00365-0) ; réédition, Paris, Fayard, 2013 (ISBN 978-2-213-66671-6) ; réédition, Paris, Grasset, coll. « Les cahiers rouges », 2014 (ISBN 978-2-246-85081-6)
The World in the Evening (1954)
Publié en français sous le titre Le Monde au crépuscule, traduit par Ludmila Savitzky, Paris, Denoël, 1956 ; réédition, Paris, Denoël, 1983 (ISBN 2-207-21194-0) ; réédition, Paris, Fayard, 2013 (ISBN 978-2-213-66667-9)
Down There on a Visit (1962)
Publié en français sous le titre L'Ami de passage, traduit par Michel Ligny, Paris, Gallimard, coll. « Du monde entier », 1964 ; réédition, Paris, Fayard, 2013 (ISBN 978-2-213-66661-7)
A Single Man (1964)
Publié en français sous le titre Un homme au singulier, traduit par Léo Dilé, Paris, Hachette, coll. « Bibliothèque anglaise », 1980 (ISBN 2-01-006505-0) ; réédition, Paris, Seuil, coll. « Points. Roman » no 138, 1984 (ISBN 2-02-006719-6) ; réédition, Paris, Fayard, 2010 (ISBN 978-2-213-65491-1) ; réédition, Paris, Grasset, coll. « Les cahiers rouges », 2014 (ISBN 978-2-246-85080-9)
A Meeting by the River (1967)
Publié en français sous le titre Rencontre au bord du fleuve, traduit par Léo Dilé, Paris, Flammarion, coll. « Bibliothèque anglaise », 1982 (ISBN 2-08-064443-2) ; réédition, Paris, 10/18, coll. « Domaine étranger » no 3335, 2001 (ISBN 2-264-03187-5) ; réédition, Paris, Fayard, 2014 (ISBN 978-2-213-66669-3)
Recueils de nouvelles
The Mortmere Stories (1920), nouvelles écrites en collaboration avec Edward Upward dont une seule fut publiée de son vivant. Certaines furent résumées dans Le Lion et son ombre, mais l'intégralité ne fut publiée qu'en 1994.
Goodbye to Berlin (1939), reprend la nouvelle Sally Bowles (1937). Recueil réédité en 1945, avec Mr. Norris change de train, sous le titre Berlin Stories.
Publié en français sous le titre Intimités berlinoises, traduit par Ludmila Savitzky, Paris, Éditions de la revue "Fontaine", coll. « La Malle de la Manche » no 2, 1946 ; réédition de la même traduction sous le titre Adieu à Berlin, Paris, Hachette, coll. « Bibliothèque anglaise », 1980 (ISBN 2-01-006504-2) ; réédition, Paris, J'ai lu no 1213, 1981 (ISBN 2-277-21213-X) ; réédition, Paris, Seuil, coll. « Points. Roman » no 503, 1992 (ISBN 2-02-013012-2) ; réédition, Paris, Hachette littératures, 2002 (ISBN 2-01-235645-1) ; réédition, Paris, LGF, coll. « Le Livre de poche. Biblio » no 3394, 2004 (ISBN 2-253-13094-X) ; réédition, Paris, Fayard, 2013 (ISBN 978-2-213-66672-3) ; réédition, Paris, Grasset, coll. « Les cahiers rouges », 2014 (ISBN 978-2-246-81138-1)
Exhumations (1966), recueil regroupant des nouvelles, articles et poèmes
Publié en français sous le titre Les Joyaux de l'architecture belge, Paris, LGF, coll. « Le Livre de poche. Biblio » no 3401, 2004 (ISBN 2-253-09925-2)
Théâtre
The Dance of Death (1933), pièce en 1 acte écrite en collaboration avec W. H. Auden
The Dog Beneath the Skin (1935), (littéralement : Le chien sous la peau), aussi parue sous le titre ou Where is Francis?, pièce de théâtre en 3 actes écrite en collaboration avec W. H. Auden
The Ascent of F6 (1937) (littéralement: L'Ascension de F6), pièce de théâtre écrite en collaboration avec W. H. Auden et adaptée à la télévision (voir ci-dessous)
On the Frontier (1938) (littéralement: Sur la frontière), sa dernière pièce de théâtre écrite en collaboration avec W. H. Auden
Autres publications
People One Ought to Know (entre 1925 et 1930), 18 poèmes illustrés par Sylvain Mangeot, âgé de 11 ans, fils du violoniste André Mangeot, édités en 1982
The Intimate Journals of Charles Baudelaire (1930), traduction en anglais des "Journaux intimes (1851-1862)" de Charles Baudelaire
A Penny For The Poor (1937), réédité sous le titre Threepenny Novel, traduction en collaboration avec Edmond I. Vesey du "Roman de Quat'sous" de Bertolt Brecht
Sally Bowles (1937)
Journey to a War (1939), écrit avec W. H. Auden
Publié en français sous le titre Journal de guerre en Chine, suivi du Journal de voyage et de poèmes de W.H. Auden, traduit par Béatrice Vierne, Monaco/Paris, Éditions du Rocher, coll. « Anatolia », 2003 (ISBN 2-268-04436-X)
The Song of The God : the Bhagavad Gita (1944) traduction avec Swami Prabhavananda de "La Bhagavad-Gita" de S. Radhakrishnan
Jacob's Hands (1944), scénario écrit avec Aldous Huxley pour le cinéma, édité en 1998
Vedanta For The Western World (1944)
Shankara's Crest-Jewel of Discrimination (1947), en collaboration avec Swami Prabhavananda
The Condor and the Cows (1949), journal de voyage en Amérique du Sud
Publié en français sous le titre Le Condor, Paris, Rivages, coll. « Bibliothèque étrangère Rivages » no 28, 1990 (ISBN 2-86930-367-X)
Vedanta for Modern Man (1951)
What Vedanta Means to Me (1951)
How to Know God: the Yoga Aphorisms of Patanjali (1953), en collaboration avec Swami Prabhavananda et Patañjali.
Great English Short Stories (1957), anthologie rassemblée et éditée par Isherwood
An Approach to Vedanta (1963)
Publié en français sous le titre Une approche de Vedânta, traduit par Daniel Bismuth, Monaco/Paris, éditions du Rocher, 2003 (ISBN 2-268-04445-9)
Ramakrishna and his Disciples (1965)
Essentials of Vedanta (1969)
Kathleen and Frank (1972) (Kathleen et Frank) biographie de ses parents
Christopher and His Kind (1976), récit autobiographique
Publié en français sous le titre Christopher et son monde: 1929-1939, Paris, Hachette, coll. « P.O.L. », 1981 (ISBN 978-2010080876)
My Guru and his Disciple (1980), récit autobiographique
Publié en français sous le titre Mon gourou et son disciple, traduit par Léo Dilé, Paris, Flammarion, coll. « Bibliothèque anglaise », 1982 (ISBN 2-08-064442-4) ; réédition, Paris, Flammarion, coll. « 10/18. Domaine étranger » no 3472, 2002 (ISBN 2-264-03233-2) ; réédition, Paris, Fayard, 2014 (ISBN 978-2-213-66666-2)
October (1983), journal intime
Publié en français sous le titre Octobre, traduit par Gilles Barbedette, Marseille, Rivages, 1984 (ISBN 2-903059-46-2) ; réédition, Paris, Payot & Rivages, coll. « Rivages poche. Bibliothèque étrangère » no 284, 1999 (ISBN 2-7436-0553-7)
The Wishing Tree (1986)
Where Joy Resides: An Isherwood Reader (1989), anthologie comprenant en texte intégral La Violette du Prater et Un homme au singulier, des chapitres de L'Adieu à Berlin, L'Ami de passage et Le Lion et son ombre, ainsi que des extraits de Exhumations, Kathleen et Frank et Mon gourou et son disciple
Diaries: 1939-1960 (1996)
Lost Years: A Memoir 1945-1951 (2000)
Kathleen and Christopher (2005), lettres à sa mère
Isherwood on Writing (2007)
Filmographie
Scénariste au cinéma
1934 : Little Friend (en), film britannique réalisé par Berthold Viertel, scénario de Christopher Isherwood en collaboration avec le réalisateur, Margaret Kennedy et Ernst Lothar
1941 : La Proie du mort (Rage in Heaven), film américain réalisé par W. S. Van Dyke, scénariste de Isherwood en collaboration avec Robert Thoeren, Edward Chodorov et James Hilton, adaptation du roman éponyme de ce dernier
1943 : Et la vie recommence (Forever and a Day), film collectif réalisé par sept réalisateurs/producteurs et 22 scénaristes dont Isherwood
1949 : Un délicieux scandale (Adventure in Baltimore ou Bachelor Bait), film américain réalisé par Richard Wallace, scénario original de Christopher Isherwood en collaboration avec Lionel Houser et Lesser Samuels
1949 : Passion fatale (The Great Sinner), film américain réalisé par Robert Siodmak, adaptation du roman Le Joueur de Fiodor Dostoïevski, scénario de Isherwood en collaboration avec Ladislas Fodor et René Fülöp-Miller
1956 : Diane de Poitiers (Diane), film américain réalisé par David Miller, scénario de Christopher Isherwood d'après une histoire de John Erskine
1965 : Le Cher disparu (The Love One), film américain réalisé par Tony Richardson, adaptation du roman éponyme de Evelyn Waugh par Isherwood et Terry Southern
1967 : Le Marin de Gibraltar (The Sailor from Gibraltar), film britannique réalisé par Tony Richardson, adaptation du roman éponyme de Marguerite Duras par Isherwood, le réalisateur et Don Magner
Scénariste à la télévision
1938 : The Ascent of F6, téléfilm britannique, adaptation par Isherwood et W. H. Auden de leur pièce éponyme
1973 : Frankenstein: The True Story, téléfilm britannique réalisé par Jack Smight, scénario de Isherwood
Adaptations de ses œuvres par des tiers
Au cinéma
1955 : Une fille comme ça (I Am a Camera), film britannique réalisé par Henry Cornelius, scénario de John H. N. Collier, d'après le recueil de nouvelles Adieu à Berlin (Berlin Stories) de Christopher Isherwood et la pièce de théâtre I Am a Camera (en) de John Van Druten
1972 : Cabaret, film américain réalisé par Bob Fosse, scénario de Jay Allen et Hugh Wheeler, d'après le recueil de nouvelles "Adieu à Berlin" ("Berlin Stories") de Christopher Isherwood, la pièce de théâtre "I Am a Camera" de John Van Druten et la comédie musicale "Cabaret" écrite par écrite par Joe Masteroff pour le livret et Fred Ebb pour les paroles, sur une musique de John Kander
2009 : A Single Man, film américain produit et réalisé par Tom Ford, d'après le roman éponyme d'Isherwood, scénario du réalisateur en collaboration avec David Scearce
À la télévision
1961 : Wise Guy, épisode 28, saison 1 de la série télévisée américaine First Person (en), scénario de Mavor Moore d'après la nouvelle éponyme d'Isherwood
2011 : Christopher and His Kind, téléfilm britannique réalisé par Geoffrey Sax, adaptation du roman semi-autobiographique Lions and Shadows: An education in the '20 et du recueil de nouvelles Adieu à Berlin ; le scénario, signé Kevin Elyot, s'intéresse enssentiellement à la vie de Isherwood avec W. H. Auden
Acteur
1981 : Riches et célèbres (Rich and Famous), film américain de George Cukor : Isherwood est l'un des invités d'une réunion mondaine à Malibu
Interviews dans des documentaires télévisés
1966 : A Stravinsky Portrait, téléfilm documentaire américain réalisé par Richard Leacock et Rolf Liebermann
1970 : E.M. Forster 1879-1970, téléfilm documentaire britannique
1976 : Memories of Berlin: The Twilight of Weimar Culture, téléfilm documentaire canadien réalisé par Gary Conklin
1978 : Charles Laugton, épisode 5, saison 2 de la série télévisée documentaire américaine The Hollywood Greats
SENTIMENTS ET TÉMOIGNAGE
DU
CITOYEN TIGNARD YANIS
ALIAS
TAY
La chouette effraie
Simon & Garfunkel - The Sound of Silence - Madison Square Garden, NYC - 2009/10/29&30...
https://www.youtube.com/watch?v=L-JQ1q-13Ek